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THE DRUMS – The Drums

Par Benjamin Fogel, le 15-06-2010
Musique

C’est l’histoire d’un groupe pour qui tout est allé trop vite (confère la sortie de l’ep « Summertime »), d’un groupe qui voulait grandir dans l’ombre de ses idoles et qui se retrouve à contempler son chanteur courir après la cadence naturelle et dénuée de tout effet de production de la rythmique de son batteur. Tout va vite chez The Drums et pourtant le groupe ne cesse de réussir à décélérer l’impression de vitesse sur le rendu, comme si entre deux cavalcades, il s’arrêtait net pour prendre une photo en noir et blanc, un instantanée qui permettrait au voyageur de traverser le continuum.

The Drums possède une vraie aisance lorsqu’il s’agit de créer des hymnes indie adolescents, des chansons pleines d’envie mais qui n’osent encore trop se dévoiler. « Let’s Go Surfing » est ainsi un tube de festival qui n’est pas prédestiné à la grande scène mais à ce petit chapiteau qui n’abritera que des vingtenaires hagards mais curieux aux lunettes mal chaussées et à la démarche mal assurée. C’est à la fois délicatement brinqueballant et puissamment entraînant. Oui c’est un peu comme si le post punk était passé au filtre de Sarah Records, comme si Ian Curtis racontait son adolescence sur des plages californiennes. Il en résulte une naïveté enfantine et un désir de liberté que l’on ne peut s’empêcher d’imaginer ne déboucher que sur une fin tragique.

Pourtant, malgré un charisme charmeur car souvent maladroit, Jonathan Pierce n’arrive pas toujours à recréer le passé avec autant de brio que ses comparses. Si sa voix manque parfois de caractères, ce sont surtout ses textes et ses recours trop récurrents à des hululements pop (« I Need Fun In My Life ») qui nuisent à son affirmation :

Wake up, it’s a beautiful morning
Honey, while the stars are still shining
Wake up, would you like to go with me
Honey, take a run down to the beach

Avec The Drums, c’est un peu tous les jours le week-end (vive les super week-ends), ça manque de la sueur du labeur de la semaine. Cette difficulté à générer des émotions poignantes grandit au point de sortir du cadre sur le poussif « Down By the Water ».

Il faut ainsi maintenir le groupe dans la boite de ses références pour pouvoir en profiter pleinement. Oui il faut apprécier la modestie dont font preuves les quatre américains dans leur volonté de se raccrocher au wagons de l’histoire. Malgré la position qui leur a été attribuée à tort sur l’échiquier musical mondial, The Drums n’est jamais ostensoir ou péremptoire. Les garçons ne prétendent jamais réinventer quoique se soit et il ne s’agit pas de posture mais d’une profession de foi qui transparaît parfaitement dans les compositions (« It Will All End In Tears »). C’est dans cette légèreté pop que se trouve son salut, dans ces titres comme « Book of Stories » qui sous la timidité et la touchante discrétion cache d’habiles mélodies, des mélodies qui comme The School savent surprendre au détour d’une implicite euphonie.

Chaque fois qu’un titre semble jouer le rôle de ralentisseur, semble n’être là que pour remplir cet espace temporel, une fugace ritournelle mélodique débarque au détour d’un refrain (« Skippin’ Town »). Et sans être pleinement emporté par ces guitares à l’accroche particulière (« Forever and Ever, Amen ») et par ces basses fabriquées par Peter Hook, on ne peut que recevoir l’ensemble avec nostalgie.

Tout The Drums est à l’image de son premier titre « Best Friend », c’est l’éphémère image d’un passé qui ne sera jamais révolu, d’un passé qui sera toujours porté par cette fougue adolescente contenue, d’un passé où le romantisme de Robert Smith se noyait dans la sensibilité de Morrissey. Parfois les souvenirs sont ce qui nous reste de mieux.

Note : 6/10

>> « The Drums » est en écoute sur Spotify