Pourtant le film de Nicolas Saada ne joue pas du tout dans cette basse-cour, et opte indéniablement pour le côté film d’auteur. Une ambiance dont aucun détail n’a échappé au réalisateur, une direction d’acteur sans faille et une gestion parfaite des silences et des éclipses font de « Espion[s] » une véritable œuvre dans laquelle être espion est plus une question d’attente et de manipulations qui affectent les personnages que de gadgets et de courses poursuites.
Cette retenue permanente où le moindre mot (qu’il soit en français ou en anglais) est pesé, cette retenue permanente qui donne tant de discrétion et de charme à la moindre note d’humour, cette pureté souvent contrebalancée par des accès de violence et par le côté blasé et alcoolique (désespéré ?) du personnage principal, tout ça nous rapproche de l’univers de l’un des plus grand réalisateurs français. Effectivement depuis la fin de la séance, je ne cesse de me dire que Nicolas Saada aurait l’étoffe pour être le prochain Jacques Audiard. Cette noirceur couplée à cette réalisation très littéraire pourrait l’amener loin.
Ainsi au milieu des jolis plans, et de l’histoire Canet/Pailhas qui n’a rien d’évidente et de prévisible, on se délecte du jeu d’acteur, d’un Stephen Rea so british (je vous conseille d’ailleurs de voir ou revoir « The Crying Game » de Neil Jordan dont il est l’acteur fétiche et qui l’a révélé), ou d’un Hyppolite Girardot très efficace.
Bien écrit, émouvant et raffiné, après « Parallèle » son premier court-métrage, Nicolas Saada réjouit et confirme également combien Guillaume Canet est devenu un acteur précieux de par ses choix de carrières et des films dans lesquels il s’implique.
Note : 8/10