Contrairement aux Etats-Unis où la culture gangsta et bling-bling s’est complètement immergée dans l’inconscient collectif, la caillera apparaît toujours sur les écrans français sous l’angle parodique ou sous la forme d’un cliché. Quel humoriste n’a d’ailleurs pas son imitation type de la canaille sous le manteau, prête à être dégainée sur commande ?
Partant de ce constat, seulement deux collectifs ont essayé d’appréhender ce milieu tel qu’il est, sans le diaboliser, sans le dénoncer mais tout en gardant à l’esprit qu’on ne peut pas faire de la canaille un héros de moralité. Brefs deux entités qui n’ont pas essayé de changer la perception des gens de la banlieue mais qui ont décidé de tout faire pour l’imposer comme un phénomène à part entière de notre pop culture à nous. Les deux collectifs en questions sont évidemment Kourtrajmé, mené par Kim Chapiron et Romain Gravas (en passant je suis une fois de plus obligé de vous mettre un lien vers La Barbichette), et Les Lascars.
« Les Lascars », dessins animés de très courte durée déployés sous forme de sketchs avaient eu un double défi à relever : réaliser un truc marrant en France qui ne fasse pas dans la copie des Simpsons et traiter en même temps avec humour mais toujours sans mépris ni glorification les jeunes de banlieue. Pour vous faire une idée de la série, une petite baston de regards s’impose ;)
« Lascars » le film devait transformer l’essai en réussissant l’impossible : transposer au format film des sketchs qui durent habituellement une petite minute. Et le pari est plus que réussi ! Albert Pereira Lazaro et Emmanuel Klotz ont réalisé un film fondé sur un vrai scénario, rythmé comme peu de films français le sont, et ont surtout réussi a imposer un univers visuel intégrant 3D et de magnifiques plans séquences tout en restant cohérent avec le style de la série. La palette graphique est richissime et les effets de styles nombreux. Bien malin, celui qui pouvait deviner à l’avance que le film posséderait autant de cachet visuel tout en conservant l’humour dévastateur originel.
Malgré la multiplication des situations, la BO et le charisme des personnages redonnent des coups de boost permanents. Si le choix de Vincent Cassel dans le rôle de Tony Merguez était une évidence, on pouvait craindre le pire des présences d’Omar et Fred ou de Diam’s, mais là aussi bonne surprise, chacun incarne son personnage dans le ton et ce sans aucune caricature mal venue ; ce qui au vu du sujet n’était vraiment pas gagné d’avance.
Alors certes le scénario est parfois un peu facile et prévisible (cf l’histoire des oursins) mais si l’on réalise un ratio (barres de rire)/(durée totale du film), on doit bien dépasser les 80% ! Une réussite inestimable et rarissime dans notre belle contrée !
Note : 8/10