« Farm » s’ouvre sur « Pieces » et c’est un retour immédiat dans le passé, Jay Mascis possède toujours une tristesse juvénile dans la voix mais a su y donner du corps. « I want You To Know » rappelle le Pearl Jam de « VS », ce qui, venant de moi, n’est pas le moindre des compliments. Le son sale, la voix étouffée, tout est là. Dommage que la guitare en fasse peut être un peu trop. Sur « Ocean in the Way », c’est plutôt « Ten » qui est évoqué. La filiation avec la bande à Eddie Vedder n’a jamais semblé aussi évidente. « Plans » s’impose rapidement comme un joli single adolescent époque « Mellon Collie and the Infinite Sadness », le désespoir d’une jeunesse sacrifiée sur l’autel des yuppies américains, un vrai moment de mélancolie grunge.
Cependant, malgré la qualité des compositions, on sent bien que Dinosaur JR reste enfermé dans le passé. « Farm » est d’une efficacité certaine mais aurait pu sortir il y a quinze ans, et les mauvaises langues n’hésiteront pas à attaquer le groupe sur cet aspect, d’autant, qu’il faut bien l’avouer, certains solos de guitares ne sont pas du meilleur goût.
« Your Weather » est un exemple de songwriting pop-noisy qui introduit le single un peu plus convenu « Over It ». Sur « Friends », Lou Barlow laisse sa guitare s’exprimer vers des sonorités plus variées, et le titre devient rapidement particulièrement entraînant.
A ce niveau là, « Farm » étonne par sa tenue, par l’absence de titres en deçà, comme si malgré les années passant, Dinosaur JR était plus que jamais capable de balancer des hymnes adolescents éternels. Tout semble d’une légèreté et d’une simplicité extrême, comme si toutes les chansons avaient été écrites lors de journées de répétitions dans une cave humide et enregistrées dans la foulée sans plus de réflexion et avec la préservation de la magie de l’instant. « Said The People » et « I Don’t Wanna Go There » appuient le groupe dans ses capacités à produire des morceaux au développement plus long qu’à l’accoutumée. Comme si le trio voulait enrayer cette logique des 12 titres oscillant entre 3,30 et 4 minutes. « There’s No Here », « See You » maintiennent le cap. L’album se termine sur « Imagination Blind », un morceau à la production sale, jouant à fond sur les graves.
Évoluant dans un monde qui n’est peut-être plus le sien, Dinosaur JR n’en produit pas moins une musique qui arrive à toucher sans jouer la carte de la nostalgie. Toujours sécurisant de savoir que de tels groupes seront toujours là pour nous.
Note : 8/10
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