La retenue est souvent la notion la plus difficile à appréhender dans une œuvre musicale. Ne pas se laisser emporter par ses aspirations, ne pas produire des instrumentations péremptoires, tel devrait être le chemin de croix de chaque aspirant. Pourtant à force de tout analyser, de tout épurer, n’y a-t-il pas un risque d’involontairement aseptiser son discours et de le vider de sa substance ? La justesse protégée de la moindre prise de risque est elle encore une forme de justesse ?
Le violoncelle se substitue à tout émotion vocale et s’appuie sur le lit d’or de la six cordes (« Pretend To Forget »). Il s’agit d’un talent qui ne fonctionne qu’en duo. Seul, le violoncelle fait les cents pas dans une prison classique (« Hope ») tandis que la guitare fonce tête baissée vers un avenir incertain (« Snowdonia »).
Malheureusement, comme évoqué en introduction, la discrétion, qualité pourtant si recherchée, finit par irriter. Message To Bears fait trop de manière au point d’en oublier d’exploiter ses meilleures idées. La rythmique électronique de « Autumn » aurait nécessité une meilleure exposition, les chœurs auraient mérité d’être remplacé par des mots (« At The Top Of This Hill »). Effectivement, à ce niveau de subtilité, le moindre défaut, le plus petite tendance à l’ennui apparaît de manière bien plus distincte.
Pour son premier album, Message To Bears livre un grand album de guitare folk, une ballade infinie qui se suffit à elle-même. Et si on voudrait parfois que cette beauté nous arrache un peu plus le cœur, qu’elle suscite des émotions plus contrastées, « Departures » reste une des plus belles invitations hivernales.
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