La musique est devenue une sorte de network matriciel futuriste où les chansons apparaissent subrepticement avant de disparaître à tout jamais dans le cosmos. Capter les signes, interpréter les mouvements, réagir vite, ne jamais baisser sa garde, récupérer ici où là des fragments de bonheur émotionnel, nourrir son âme par morceau, par à-coups.
Apparition furtive, disparition définitive, le phénomène était si mystérieux, qu’allant à l’encontre de tous mes principes, j’ai décidé d’en savoir plus, mais les informations s’étaient également dispersées. J’ai décidé d’accepter l’inconnu et de ne pas poursuivre mes recherches. Il ne me reste que la source, je m’en contenterai aisément.
Gobble Gobble est seul (Cecil Frena) mais semble se produire en duo. Il est originaire de Edmonton au Canada mais je ne suis pas sur que cette ville existe. Il aborde un accoutrement féerique mais je crois que ce n’est que pour cacher des traumatismes.
La voix passe par mille filtres comme pour masquer des ressentiments trop personnels et est emportée par des notes de guitares piquées (« Meteor Eschat »). Ca ne sort de nulle part, ça se matérialise devant vous et ça vous cloue au sol. Les voix sont à la fois proches et lointaines (« Piles of Salt »). Il s’agit d’une forme toute particulière de home-pop ou les contraintes de production deviennent une force (« O Sacred Dansruff »). Même si parfois le groupe tire un peu sur la corde en essayant de vous arracher des larmes superficielles (« Woodpact »), qui voudrait empêcher les échappatoires composées sur son lit des soirs de pleine lune.
« Neon Graveyard » est ainsi fait de ces petits riens qui font les grands touts. Une ballade pour piano par ci (« Ash Fountain »), des sonorités 8-bits par là (« Misericordia »). Sous les chansons déstructurées se trouvent d’incroyables mélodies pop. Avec trois fois rien Gobble Gobble concurrence Yeasayer (« Alabaster Bodyworlds »). Et puis surtout il y a « Born Stray » un incroyable single inde porté par une boite à rythme soutenue et proposant une version lo-fi d’Oneida.
Il ne reste plus qu’à réactiver les capteurs, allumer tous les radars et espérer que Gobble Gobble se rematérialise un jour devant nos yeux incrédules.
Note : 7/10