Non content d’avoir publié le formidable « Oversteps » d’Autechre et de s’appréter à nous livrer le nouvel opus de Flying Lotus, Warp nous offre Gonjasufi, machine à mélanger les genres justement produite par Flying Lotus. De Gonjasufi, on ne sait pas grand-chose, quelques infos égrenées, des éléments distillés ici ou là, des rumeurs glanées sur le fil de la toile. A vrai dire à part le fait qu’il est originaire du Nevada, tout reste plutôt flou, au point de susciter comme avec Burial les plus folles suppositions sur son identité (certains ont même rêvé y entendre Sufjan Stevens…)
« A Sufi And A Killer » est un album difficile à situer, une sorte d’electro-punk-soul chantée par un Tom Waits halluciné. Tout ce qu’on peut dire c’est que Warp est de plus en plus imprévisible dans ses choix au point qu’on ne serait plus étonné d’y retrouver signé un groupe de post-hardcore ou de folk cubaine.
Les tâtonnements électroniques restent toujours lo-fi dans l’esprit (« Holidays », « Ancestors ») comme si Gnarls Barkley jouait de la folk. Le groupe apaise (« Dust ») puis crie comme un bluesman affamé (« DedNd »). « She Gone. » a ce côté cirque arménien qui rappelle indéniablement une version folk de System Of A Down. Sentiment non démenti, par le rugueux « SuzieQ » où Gonjasufi est à deux doigts de scander une rage viscéralement rock’n’roll.
On part parfois dans de la BO d’un western hypnotique (« Sheep »), les pistes se brouillent pour former un collage spaghetti psychédélique qui incorpore des samples de toutes les cultures (« Kowboyz&Indians »). C’est définitivement le bordel comme si des dissidents faisaient une fête dans la cave de « Plastic Beach » alors que des invités prestigieux travaillent à la surface sans entrain (« Love Of Reign »).
Parfois un peu bavard, un peu trop aisément funky (« Candylane ») et prônant un fourre-tout parfois fatiguant (« Klowds »), « A Sufi And A Killer » n’en est pas moins une étrange découverte qui devrait révéler à chaque nouvelle écoute des surprises supplémentaires.
D’une hallucinante maturité (« Advice »), Gonjasufi signe ici un premier album souvent jouissif, qui ferait une excellente bande-son pour un futur Tarantino.
Note : 7/10
>> A lire également, la critique de Ed Loxapac sur Chroniques Electroniques, la critique de Benoit sur Hop, et l’article sur Adikt Blog