Aa
X
Taille de la police
A
A
A
Largeur du texte
-
+
Alignement
Police
Lucinda
Georgia
Couleurs
Mise en page
Portrait
Paysage

Changement de cap, le cheval de Troie a pénétré le château holywoodien et dévoile maintenant sa vraie personnalité : celle d’une musique aussi psychédélique qu’immédiate, celle d’une pop aussi folle que rythmée qui doit autant au Flaming Lips qu’au Beatles (si Dave Fridmann a délaissé la production, il s’occupe toujours du mixage).

Avaient-ils prémédité dès le départ de faire exploser le système de l’intérieur ? Non on ne peut imaginer le duo de Brooklyn si calculateur, si positivement machiavélique. Il s’agit ici plus de saisir une opportunité et de faire les bons choix de carrière. Le hasard ne vous met pas tous les jours un « Kids » entre les cordes, et mieux vaut consolider une base que de foncer tête baissée dans les nimbes illusoires d’un succès trop furtif. Avec « Congratulations », MGMT prouve pour le pire et pour le meilleur qu’il n’est pas le groupe d’un été mais bien un acteur crédible d’un psychédélisme moderne à la pointe de l’hypnose indolore (avec les avantages et inconvenants qui caractérisent un tel positionnement).

Pop de cirque (« Song For Dan Treacy ») ou du continium espace-temps (« It’s Working »), MGMT est affable et bavard : c’est Happy Days dans une cave, c’est David Baker qui aurait retrouvé les joies simples de l’adulescence. Les deux premiers titres de « Congratulations » ne laissent aucun doute sur le sujet. Il serait injuste de reprocher au groupe des velléités commerciales ou des accointances putassières.

« Flash Delerium » s’avère un titre solide qui confirme les intentions en conciliant toutes les orientations : c’est à la fois diligent et réfléchi, abordable et baroque. « Congratulations » est l’album des oxymores : folie attachante et complexité accessible cherchent à convaincre les ayatollahs sans perdre le public. Je ne leur jetterai pas la pierre ; la démarche ne manque ni de noblesse ni de sens du défi. MGMT est définitivement à l’image du titre « Siberian Breaks » : un groupe ambitieux et plein d’envies qui a cependant du mal à canaliser ses aspirations. Sur les douze minutes de ce titre phare, les américains offrent un univers personnel où une pop barrée prend son temps de développer d’entraînantes mélodies electroniquement violoniques et où les chœurs féminins viennent répondre à la complainte du premier plan. Il y a un côté cinématographique là dedans avec un soupçon de Air, le tout usant des codes de la pop psychédélique. C’est totalement fourre-tout, savoureux sur quelques minutes puis grossier sur le pont suivant.

Il y a une certaine ironie à intituler un de ses titres « Brian Eno » et à en tirer une salve indie-punk anglais (imaginez Owen Pallett qui intitulerait une cavalcade féerique « Jacob Bannon »). Le résultat est une fois de plus déstabilisant : sous le côté fou et vif, il y a un je ne sais quoi de trop forcé.

Car oui, le cul entre deux chaises, les gars de Brooklyn tirent dans tous les sens : sur leurs ennemis, sur leurs alliés et surtout sur les pays neutres !!! « Congratulations » est un album à risque. Pour s’engager sur ce genre de concept, il faut avoir l’exigence de chaque titre tant le moindre pied brinqueballant peut faire écrouler la machine ! C’est d’ailleurs ce qu’il se passe sur « Lady Dada’s Nightmare » où les nappes anachroniques d’un clavier bon marché peinent à reconstituer les développements classiques dont voudraient se targuer les américains. De même, « Someone’s Missing » après une introduction vaine retombe pour quelques minutes dans les travers hippiesques de « Oracular Spectacular ». Rien de grave dans l’idée, le problème c’est que sur 9 titres, les moindres écarts rendent très vite un tiers du disque non valable. Surtout que ce second album repose sur un parti pris draconien : l’utilisation systématique du clavier et le refus de s’entourer et de faire appel à de l’aide extérieure. La démarche est noble mais le résultat est décrédibilisé, par exemple, par l’utilisation de harpes électroniques aux effets douteux sur « Congratulation ».
On en regretterait presque la franche efficacité des singles passés. Oui la force d’adhésion a peut-être été trop fortement diluée, et c’est bien l’auditeur qui est le plus trahi. Avec autant de cartouches vidées, pas étonnant que MGMT fasse parfois mouche ! Mais combien de munitions gâchées pour finalement si peu de cibles atteintes. On se dit surtout que c’était bien la peine de faire sauter tous ces pétards, d’activer toutes ces mèches et de s’auto-proclammer roi de la guerre, pour au final capituler dès le premier titre de folk spatiale venue (« I Found A Whistle »). C’est un peu ça le problème de MGMT : dès que les balles arrêtent de siffler et que les mélodies des morceaux se retrouvent épurées, il ne reste plus assez d’émotions pour renverser le gouvernement.
Note : 5/10
PS : La bienséance m’a obligé à autoréguler toutes remarques et autres blagues de mauvais goûts sur la pochette.
>> L’album est en écoute intégrale sur www.whoismgmt.com