Originaire de Duluth dans le Minnesota (comme le rappelait leur album de 2008), Trampled By Turtles est un quintet bluesgrass qui inocule au style une énergie nouvelle sans pour autant jamais avoir recours à d’autres instruments, sans jamais essayer de faire évoluer le genre musical en lui offrant des ouvertures et des lieux de rencontre avec des genres plus contemporains. L’ambition du groupe tire sa noblesse dans sa volonté de révolutionner sans jamais corrompre.
Ainsi on retrouve sur ce sixième album en 5 ans, toutes les caractéristiques du style : le recours unique à des instruments acoustiques (guitare, contre-basse, banjo, mandoline et violons), les harmonies vocales à quatre voix (même si Dave Simonett reste le plus souvent en avant), le jeu des solos par intermittence… A part le plus country « Bloodshot Eyes », du fait de l’utilisation d’un harmonica, aucune chanson ne s’éloignera de la feuille de route.
Par le passé, Trampled By Turtles a déjà prouvé son sens pour les ouvertures saisissantes, et tout comme « Trouble » commençait également par le péchu « Valley » et « Blue Sky and The Devil » par le « I’m a target to » qui laissait presque penser à une reprise de Nirvana, « Palomino » démarre sur le pétardant « Wait So Long », un titre d’une telle violence que l’on s’interroge sur la manière dont, tout en respectant les codes, le groupe arrive à tirer le maximum du bluesgrass au point de lui ajouter un suffixe core.
Enchaînant les cavalcades instrumentales qui tirent le Diable à travers l’ouest (« New Son/Burnt Iron »), la tension ne diminue jamais, comme si à chaque titre Dave Carroll poussait son banjo dans de nouveaux retranchements. L’un des tests à faire pour se rendre compte de l’inhérente énergie dégagée par les cordes est d’essayer de caler à la moitié du disque son oreille sur la batterie, et de réaliser l’air hagard, que non aucune percussion n’a jamais contribué au puissant vacarme qui s’est déroulé sous les yeux ébahis (« It’ a War »).
Certes, dans sa deuxième partie, Trampled By Turtles compile des morceaux qu’on ne pourrait que difficilement attribuer avec certitude à ce « Palomino », tant un « New Orleans » par exemple pourrait être issu de n’importe lequel des albums précédents. Mais l’authenticité, l’inventivité que fait preuve le banjo sur « Separate », la vitesse d’exécution globale et surtout le chant désabusé mais jamais rocailleux de Dave Simonett en font un objet inattendu et un nouvel étalon pour le genre.
Note : 8/10
>> « Palomino » est en écoute sur Spotify
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