Aa
X
Taille de la police
A
A
A
Largeur du texte
-
+
Alignement
Police
Lucinda
Georgia
Couleurs
Mise en page
Portrait
Paysage

Wovenhand : Dieu, les autres cultures et la misanthropie.

A propos de The Laughing Stalk

Par Benjamin Fogel, le 26-10-2012
Musique

Cela fait plus dix ans que Wovenhand existe, et, malgré la qualité des huit albums parus tout au long de cette période, certains semblent conserver une nostalgie de l’époque 16 Horsepower. David Eugene Edwards s’en est presque fait une raison. De toute façon, à chaque fois qu’il avance dans la vie, on lui répond que c’était mieux avant. On lui aura ainsi successivement reproché d’avoir quitté Bloodflower pour Denver Gentlemen, Denver Gentlemen pour 16 Horsepower, puis 16 Horsepower pour Wovenhand. Mais s’il devait écouter les gens, jamais il n’avancerait. Comment réagir face à ceux qui lui disent qu’il s’est détourné de ses racines originelles pour s’orienter vers un rock plus rentre-dedans et plus consommable, lui qui n’a jamais rien trahi, ni de son passé, ni de ses convictions ?

A cause de ça et de mille autres facteurs, David Eugene Edwards a une confiance limitée dans les hommes – il évite les interviews et débusque les imposteurs. Et ce manque de confiance, il faut le mettre en perspective de son amour pour Dieu et de sa curiosité des autres cultures.  Lorsque l’on essaye de définir les grandes lignes de son caractère et de ses engagements – et ce au risque de simplifier/caricaturer un peu la chose –, on dessine David Eugene Edwards comme un fervent chrétien misanthrope passionné par les autres cultures. Et c’est peut-être cette position paradoxale qui fait tout le charme de Wovenhand : à travers elle, on comprend mieux pourquoi l’on a l’impression d’écouter un prêche à la fois lumineux et tortueux. Oui Wovenhand fait du dark gospel : les textes sont là « Oh my holy prince first… risen before us upheld by his own holiness. He has mad known… salvation unto the Lord alone » et le sentiment d’être habité à l’écoute par une force supérieure également. Et pourtant, la lumière qui devrait nous irriguer a toujours un arrière-goût de ténèbres, car encore une fois Wovenhand, c’est l’histoire d’un mec qui aime Dieu et Joy Division. Du coup, ses chansons n’ont jamais été des incantations, mais vraiment des prières ; il n’y a pas de mysticisme chez lui, et je réalise seulement maintenant combien mes anciennes comparaisons entre Wovenhand et Current 93 étaient infondées.

Une fois de plus, The Laughing Stalk est un album particulièrement religieux, et c’est assez surprenant en l’écoutant de réaliser que jamais ça ne nous viendrait à l’esprit de parler de rock chrétien, comme si celui-ci n’était finalement non pas une question de rapport à Dieu, mais seulement une attitude. Peut-être est-ce aussi parce que David Eugene Edwards ne fait jamais de prosélytisme. D’ailleurs, l’un de ses combats est de fustiger ceux qui utilisent la religion pour justifier leurs actes immoraux, comme le colonialisme et les conquêtes religieuses. Lui est d’origine amérindienne et il aime que les autres cultures nourrissent sa religion. Il affirme ainsi : « My relationship with God is what gives me the ability. I hope, to have a connection with other cultures and to have the proper respect for them and their culture and for their spiritual ideas ». On ne va pas s’étendre sur le message d’amour qui est le sien, mais il faut bien savoir combien le sérieux et l’absence de manichéisme,  avec lesquels il le véhicule rend sa démarche crédible. Par exemple sur Coup Stick, il chante « Wait for beloved of God, In peace enlarges his people. My father is God. He breaths the people’s cause…» et l’ensemble du titre est de cet acabit (il s’agit surtout d’une chanson musicalement magnifique : tribale, poussiéreuse de délicieusement rock, elle me donne des frissons lorsqu’arrive le refrain et qu’il dit « My Messenger The Star »). Mais c’est dans le livret que se retrouve la contraposée. Dans ce dernier, à la place du texte de la chanson, on retrouve des noms comme Salomon, Tibni, Jehoram, des personnages liés au royaume de Juda et au royaume d’Israël. Et alors on se demande si le but de la chanson n’est pas de dénoncer les faux prophètes (je n’ai rien trouvé sur le sujet et je suis preneur d’éléments sur le comment du pourquoi de cette substitution).

The Threshing Floor, son album précédent, était pour moi un disque de synthèse. On y retrouvait tout ce qui a construit son histoire (A Holy Measure) ; il se fondait à la fois sur la culture de 16 Horsepower, sur ses influences de toujours (Thruth, reprise de New Order) et sur le son de Denver qu’il a largement contribué à définir (Denver City). The Laughing Stalk donne au contraire l’image d’un musicien qui est arrivé au bout de son parcours et qui se contente maintenant de faire ce qu’il sait/aime faire sans chercher ni à se dépasser, ni à évoluer. C’est cela qui explique à mes yeux la couleur plus rock de ce nouvel album. Certes le départ de Pascal Humbert, et l’arrivée Gregory Garcia Jr à la basse et de Chuck French à la guitare ont pu avoir un certain impact, mais on a surtout l’impression que David Eugene Edwards a désormais accepté les choses et le temps qui passe, comme s’il ne se préoccupait plus de sa propre mortalité comme à l’époque de  Consider The Birds. En ça The Laughing Stalk est à la fois un album apaisé (car dénué d’enjeux) et électrique (car gorgé de plaisir et de dévotion).

Références :
>> David Eugene Edwards sounds off on his musical past, present and future, par Tom Murphy

<div id='gsWidget'><object width='210' height='374'><param name='movie' value='https://listen.grooveshark.com/widget.swf'></param><param name='wmode' value='window'></param><param name='allowScriptAccess' value='always'></param><param name='flashvars' value='hostname=cowbell.grooveshark.com&songIDs=36880593,36880562,36880615,36880639,36880665,36880684,36880713,36880750,36880775&bt=eaeffe&bth=333333&bbg=333333&bfg=568099&pbg=eaeffe&pfg=333333&pbgh=568099&pfgh=eaeffe&lbg=eaeffe&lfg=333333&lbgh=568099&lfgh=eaeffe&sb=eaeffe&sbh=568099&si=eaeffe'></param><embed src='https://listen.grooveshark.com/widget.swf' type='application/x-shockwave-flash' width='210' height='374' flashvars='hostname=cowbell.grooveshark.com&songIDs=36880593,36880562,36880615,36880639,36880665,36880684,36880713,36880750,36880775&bt=eaeffe&bth=333333&bbg=333333&bfg=568099&pbg=eaeffe&pfg=333333&pbgh=568099&pfgh=eaeffe&lbg=eaeffe&lfg=333333&lbgh=568099&lfgh=eaeffe&sb=eaeffe&sbh=568099&si=eaeffe' allowScriptAccess='always' wmode='window'></embed></object></div>