PS’Playlist septembre 2013

1) Survivor – “Burnin Heart” (Axel Cadieux)
Extrait de Rocky IV Soundtrack – 1985 – Rock
Rocky c’est la vie, surtout le 4, dans lequel il se bat dans la neige et contre des éléments déchaînés, le colosse Dolph Lundgren en premier lieu. Le monde serait meilleur si “Burning Heart” retentissait tous les matins dans toutes les enceintes du monde.

2) Troumaca – “Gold, women, and wine” (Catnatt)
Extrait de “The Grace” / 2013 / Pop Tropicale
La phrase de trop : celles de Valls, soutenu par Hollande à propos des roms. Je suis écoeurée, on ne pouvait pas tomber plus bas. Il n’y a clairement plus d’issue. Alors, de dépit, je décide que je me tape complètement de ce qui se passe pour le moment : so bring me gold, men and wine question de faire passer cette p… d’amertume. Et de fredonner ce refrain jusqu’à ce qu’un répit effleure la surface de mes espoirs.

3) Arcade Fire – “Reflektor” (Jean-Sébastien Zanchi)
Extrait de Reflektor – 2013 – Rock
Je n’ai jamais aimé Arcade Fire. Ne criez pas au scandale, c’est comme ça, leur musique ne m’a jamais ému. Pourtant, quand j’ai vu que leur dernier clip était réalisé par l’immense Anton Corbijn, ça m’a mis la puce à l’oreille. Puis je vois le nom de James Murphy à la production. Et enfin David Bowie aux choeurs. Tout était réuni pour j’apprécie enfin ce groupe et c’est le cas avec ce nouveau single. Pour la première fois, j’ai hâte d’écouter leur prochain album.

4) Gary Numan – “Cars” (Christophe Gauthier)
Extrait de “The Pleasure Principle” – 1979 – New wave
Attention, earworm. Il suffit de penser un instant à ce morceau, pilier de la synthpop, pour l’avoir en tête toute la journée. Voire plus : ça fait 15 jours que je ne parviens pas à m’en débarrasser. Gary Numan a beau sortir de nouveaux disques (le prochain, “Splinter (Songs from a Broken Mind)” sortira mi-octobre), il est condamné à chanter Cars jusqu’à la fin de sa vie. Quitte à s’autoparodier, comme dans cette pub américaine où on le voit jouer son hymne à la bagnole… à l’aide des klaxons de 24 bagnoles. Cherchez bien, c’est sur YouTube.

5) Nine Inch Nails – “Copy of A” (Olivier Ravard)
Extrait de Hesitation marks– 2013 – Miracle auditif
Trent Reznor s’autoplagie, la colère en moins. Reste la tension, la faculté surnaturelle à transformer l’ordinaire en miracle auditif – ce morceau recycle sans vergogne “The Hand That Feeds” – et un morceau parfait pour danser sur les ruines de votre salon dévasté. J’ai écouté ce truc 58 fois en 15 jours. Soit 79,26 minutes. C’est juste pour situer.

6) Johnny Cash – “Hurt” (Isabelle Chelley)
Extrait de American IV : The Man Comes Around – 2002 – rock
Entre cette chanson-là et moi, c’est personnel. La version de Johnny Cash, douloureuse, fragile, dernier souffle d’un géant en train de nous dire adieu, supplante de très loin l’originale signée Nine Inch Nails. Entre les pattes de n’importe qui d’autre que Cash et Rick Rubin, le producteur à l’original de la série des American Recordings, le morceau aurait pu sombrer dans le pathos facile. Mais le résultat est juste superbe dans son minimalisme, fout le frisson et définit en trois minutes trente ce qu’est le déclin, la vieillesse, la mort, la vie qui fout le camp à petit feu. Je ne dois pas être la seule à penser que la reprise est supérieure à l’originale. Désormais, sur scène, Nine Inch Nails s’inspire du côté dépouillé du “Hurt” version Cash pour interpréter cette foutue ballade à vous déchirer le cœur.

7) Mazzy Star– “California” (Alexandre Mathis)
Extrait de Seasons of your Day – 2013– Douceur rock alternatif
Autant être honnête tout de suite, mon amour inconditionnel pour Hope Sandoval fait déjà 50% du travail dans la réussite de ce come-back de Mazzy Star. Cette voix qui a marqué mon adolescence, ces touches d’harmonica, sa moue boudeuse, ce petit basculement de hanches devant un micro qu’elle semble dompter avec difficulté : Hope c’est un peu ma reine de la musique. Et pour ne rien gâcher, le premier extrait du nouvel album de Mazzy Star (17 ans après le dernier !) est délicieux. Doux et puissant, lyrique et discret. Par-fait !

8) Os Mutantes – “A Minha Menina” (Jorge Ben) (Eeleria)
Extrait de Os Mutantes – 1968 – Tropicalia
Nous sommes en 1968, le Brésil vit sous une dictature militaire depuis quatre ans, avec la bénédiction de l’Oncle Sam. Pourtant, plus que tout autre endroit sur Terre, sous le pavé il y a bien une plage dans ce pays. Avant le coup d’état, la Gauche n’existait pas au Brésil, le coup d’état la fit naître. Sur ce terreau devenu fertile, une conscience de Gauche grandira et une bande d’artistes défiera le pouvoir avec sa musique anthropophage. Ainsi est né le Tropicalia, le premier genre de rock hybride mélangeant les rythmes africains et brésiliens à la force brute du rock occidental. Os Mutantes fut le meilleur groupe du monde le temps de son premier album en reprenant des standards dont ce A Minha Menina de l’immense Jorge Ben.
En 2013, la Gauche est au pouvoir depuis l’élection de Lula en 2003 et en 2014 le monde fêtera ce pays comme il se doit. Et pourquoi ne pas fêter ça avec le mouvement Tropicalia ?

9) Hint – “100% white puzzle” (Anthony)
Extrait de “Collision Tour 2009” avec Ez3kiel / 1995 / Noise éruptif
Réédition en vinyle de “100% White Puzzle”, leur premier album de 1995, reformation pour une nouvelle tournée… En 2013, il existe donc quelques bonnes raisons de ne passer à côté de HINT, car ces angevins étaient l’une des meilleures choses qui soit arrivée sur la scène française Noise/Post-Rock. Après presque 20 ans, je reste toujours ébahi par la puissance martiale de ce titre. J’aimerais qu’il ne demeure pas un secret trop bien gardé (ici, la seule version disponible sur Spotify est celle jouée live en 2009 avec Ez3kiel).

10) Fauve – “Blizzard” (Alexis Fogel)
Extrait de Album “Blizzard” – 2013 – Spoken Word 
Dès que tu rentres un peu dans Fauve, ça se fout quelque part dans tes tripes et d’un coup t’as envie de le faire découvrir à tous tes potes. Pourtant ce n’est pas un groupe qui se partage si facilement. Il faut être en condition pour apprécier. Il faut trouver le bon moment.

11) Bohren & der Club of Gore – “On Demon Wings” (Julien Lafont-Laumont)
Extrait de Sunset Mission – 2000 – Dark-Jazz
Avec un nom pareil, j’en reviens toujours pas qu’on puisse faire une musique aussi pénétrante. J’ai commencé à aimer le jazz comme ça : en découvrant qu’il pouvait être un langage magnifique pour évoquer les déambulations nocturnes. “On Demon Wings” me fait penser à ça, à la tristesse sous l’écharpe, à peine anesthésiée par un froid rude, sec et imposant. On marche, on ne sait pas où on va ; on continue.

12) Georgi Kay – “Joga” (Arbobo)
Extrait de “In My Mind” / 2013 / Reprise Folk
Top of the lake est un feuilleton réussi mais glacial et d’une telle retenue qu’on n’est pas toujours sensible aux atrocités que vivent les personnages. D’épisode en épisode, la guitare d’une jeune australienne apporte un touchant supplément d’âme. Lorsqu’elle interprète cette reprise de Björk, elle suspend le temps et nous offre un des rares moments de grâce de cette série déroutante.

13) Boom Boom Satellites – “Push Eject” (Ulrich)
Extrait de “Out Loud” / 1998 / Genre Avant 65daysofstatic, il y eut Boom Boom Satellites
Un soir de février 1999. Lassé du régime whiskey – petits fours au carré frais, j’ai défié un pote à une battle musicale, histoire d’égayer une soirée qui devenait chiante comme l’eau de pluie. Il me balançait ses morceaux de Hip Hop, je lui balançais mes morceaux de noise rock japonais. Le but du jeu était de rendre les armes par ko sonore. J’ai triché et ai mis ce morceau du groupe électronique de Boom Boom Satellites. Il en resta bouche bée. And the winner waaaaaaaaaaas…

14) Baby Dee – “Calvary” (Thomas Messias)
Extrait de The Robin’s Tiny Throat – 2007 – Pop baroque
Dans la scène la plus stupéfiante du somptueux Mourir comme un homme, les transsexuels en perdition de João Pedro Rodrigues font une pause dans la forêt pour y écouter un morceau semblant être joué depuis les cieux. La ritournelle baroque de la chanteuse trans Baby Dee fait office de curieuse parenthèse enchantée, qu’on écoute assis seul avec soi-même, à se demander si on est bien celui qu’on dit être.

15) Volcano Choir – “Byegone” (Benjamin Fogel)
Extrait de “Repave” / 2013 / Post Rock
Je m’étais un peu lassé de Bon Iver, et malgré le changement de cap réalisé sur l’album de 2011, je n’étais pas sûr que Justin Vernon ait encore quelque chose à raconter. Et puis, les choses se sont bousculées et Vernon s’est complètement révélé / réinventé. Le personnage du folkeux, timide et renfermé sur lui-même, a laissé la place à un type généreux, curieux et dévoué à la musique, capable de s’effacer complètement pour mieux soutenir les projets des autres (indispensable sur le dernier Colin Stetson) et de se fondre dans des univers inattendus (sur le Yeezus de Kanye West). Au sein de Volcano Choir, il collabore pour la seconde fois avec le collectif post-rock Collections of Colonies of Bees ; enfin il s’agit presque de la première tant sa prestation avait précédemment été anecdotique. Cette fois il est vraiment la voix du groupe, qui s’en retrouve stimulé et trouve un équilibre entre mélodies et expérimentations, le tout pour un très bel album pas mal surprenant.

16) Islands – “Becoming The Gunship” (Marc Mineur)
Extrait de “Becoming The Gunship” / 2013 / Pop
Les albums passent et Islands évolue tout le temps. Mais leur étrangement nommé Ski Mask peut apparaitre comme une synthèse de tout ce qu’ils ont pu faire depuis la disparition des Unicorns (non, les licornes ça n’existe plus…) et on aime retrouver des petites douceurs un brin coupables comme ce Becoming The Gunship.

17) Julie Doiron – “I Woke Myself Up” (Nathan)
Extrait de Woke Myself Up – 2009 – Folk
Choisir une seule chanson de Julie Doiron est une tâche ardue. Parce qu’elles sont toutes délicates, drôles et jolies. “I Woke Myself Up” a cela de particulier qu’on la retient toute sa vie. Depuis la première fois où je l’ai entendu, ce “maybe this coffee is a bad idea” accompagne chacun de mes matins, avec la première gorgée de café. Histoire de bien commencer la journée. Julie Doiron, meilleure que l’ami Ricoré.

18) The Fiery Furnaces – “The End Is Near” (Thierry Chatain)
Extrait de I’m Going Away – 2009 – chant du départ
Ça pourrait être un hymne salutiste, avec ses harmonies simples et son message avertissant d’une fin prochaine. Sauf qu’il n’y est pas pas question de repentir, mais de résignation. Ça pourrait être une chanson de rupture amoureuse, mais c’est l’annonce d’une double rupture musicale. Dans l’art du groupe, qui se fait ici plus limpide, plus accessible. Et entre Matthew et Eleanor Friedberger, la petite sœur s’étant depuis envolée dans une carrière solo ici esquissée et élégamment subtile, et le grand frère dans des aventures toujours plus conceptuelles. Point final ou points de suspension ? L’histoire reste à écrire.