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Patrick Wang, Jeremy Saulnier : les confirmations

Présentés à l'ACID et à la Quinzaine des Réalisateurs au festival de Cannes 2015. Durée : 1h43 / 1h34.

Par Axel Cadieux, le 27-05-2015
Cinéma et Séries
Cet article fait partie de la série 'Cannes 2015' composée de 14 articles. En mai 2015, la team cinéma de Playlist Society prend ses quartiers sur la Croisette pour une série de textes couvrant tout autant la sélection officielle que les sélections parallèles. Voir le sommaire de la série.

À Cannes cette année, il y a eu les consécrations Apichatpong Weerasethakul et Miguel Gomes. Et puis, toujours en marge de la sélection officielle, deux confirmations après des essais déjà très réussis : Patrick Wang et The Grief of others à l’ACID, Jeremy Saulnier et Green Room à la Quinzaine des réalisateurs.

Une forme d’étrangeté flottante, partout présente et pourtant impalpable.

In the family, premier film du Texan Patrick Wang, était d’une beauté à tomber : plans fixes à la Ozu à hauteur de table, splendeur de la lumière, intelligence du cadre et de l’utilisation de la durée. L’œuvre d’un maître, qui n’a pourtant jamais fait de cinéma et arrive d’un peu nulle part, très peu cinéphile mais formé au théâtre. Un profil atypique et ultra prometteur, potentiellement décevant étant données les espérances suscitées. Mais The Grief of others est mieux qu’une confirmation : c’est un sacre. Le film est beaucoup plus complexe à aborder que le précédent, la narration encore plus déstructurée mais la maîtrise de Wang est totale, comme s’il atteignait, déjà, la maturité. Aux plans fixes somptueux dans lesquels il ne se passe finalement pas grand chose mais qui recèlent une intensité émotionnelle hors du commun, s’ajoute une forme d’étrangeté flottante, partout présente et pourtant impalpable. Elle se manifeste plus nettement lors de ces instants magiques, quand Wang superpose les plans ou les époques pour atteindre une forme d’abstraction poétique insoupçonnée. The Grief of others n’est rien de moins que l’accouchement d’un grand cinéaste.

Green Room cache derrière ses ambitions de mini Peckinpah une vraie sensibilité à la John Hughes.

Green Room n’a peut-être pas la même ampleur, mais il reste remarquable. Jeremy Saulnier, auteur du plutôt bon Blue Ruin, acclamé il y a deux ans au même endroit, progresse très clairement : son film en semi huis-clos fait un bien fou au cinéma de genre et possède quelques scènes mémorables. Surtout, et c’est bien le plus important, Green Room cache derrière ses ambitions de mini Peckinpah une vraie sensibilité à la John Hughes, obnubilé par le passage à l’âge adulte et ce que cela comporte de sacrifices. C’est bel et bien le cœur du film, et ce qui l’extrait de la masse : sa mélancolie à peine dissimulée. Voilà au moins une chose que Patrick Wang et Jeremy Saulnier partagent et honorent, dans l’ombre, à l’écart du tumulte.