Dans un futur indéfini, la Terre a été envahie par une nouvelle espèce, les Naytibas, des monstres sanguinaires à l’origine inconnue, qui ont poussé la Matri-Arche, intelligence artificielle suprême, à évacuer la civilisation vers l’espace, au sein de colonies orbitales, en transformant les hommes et les femmes, en androïdes capables de survivre dans des conditions extrêmes. Planifiant une reconquête de la Terre, la Matri-Arche monte une armée, qui par vague successive va tenter de reprendre le contrôle de la planète. Les joueurs et les joueuses incarnent Eve, soldat issue du 7e escadron aéroporté, et seule survivante du dernier assaut. Dans des contrées et anciennes villes dévastées, soumises au contrôle primaire des Naytibas, Eve va découvrir que des humains, regroupés dans la ville de Xion, ont réussi à survivre. C’est le début d’un long combat, où l’humanité de chaque groupe se retrouve interrogée sous un angle différent, pour déterminer qui est légitime ou non à habiter la Terre.
Simultanément ultra-sexualisée et ultra-robotisée, Eve porte ces questionnements sur la chair et le numérique, incarnation à la fois d’une star de K-pop corréenne – Hyung-Tae Kim, le réalisateur de Stellar Blade, tout comme le studio, sont originaires de Seoul – et déclinaison vidéo-ludique de Motoko Kusanagi, l’héroïne de Ghost in the Shell de Masamune Shirow. Stellar Blade va alors faire la synthèse entre l’aspect féérique, où la musique joue un rôle important, de Final Fantasy, et un univers cyber-punk proche de Blade Runner. Les ruptures de ton sont nombreuses. Esprit kawai et survival horror se mélangent à des questionnements sur l’avenir des sociétés, avec quelques beaux moments de poésie – notamment avec une chanteuse d’opéra qui a perdu son corps.
À l’image de ses thèmes, Stellar Blade s’avère un jeu malmené entre plusieurs envies, alternant niveaux en couloir et explorations de mondes ouverts, proposant des combats exigeants et précis, mais cultivant – volontairement ou non – une sorte de flou artistique lors des phases de plateforme. En empruntant des bonnes idées un peu partout – confer les check-points où les vielles cabines téléphoniques servent à se téléporter d’une zone à l’autre, comme dans Matrix des sœurs Wachowski – et en cultivant sa propre personnalité, grâce à plein de trouvailles visuelles, Stellar Blade finit par s’imposer comme une œuvre unique. Surtout – et cela peut constituer une surprise si l’on n’y a pas été préparé –, dans sa dernière ligne droite, le jeu marche dans les pas des Dark Souls et de Sekiro, avec des combats de boss d’une rare intensité, générateurs de stress, qui requièrent maîtrise et entrainement, sans jamais délaisser le fun.