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Gotan Project reste une étrange entité à mille lieux des préoccupations classiques. Alors que les voies du succès s’étaient ouvertes sous l’impact d’une réinterprétation électronique du genre avec « La Revencha Del Tango », le groupe s’était avec « Lunatico » volontairement écarté d’une carrière trop facile en se recentrant sur son leitmotiv premier : donner une nouvelle résonance au tango. Mais si j’avais beaucoup aimé la démarche et ce côté « on vous a facilité l’accès mais maintenant il va falloir nous suivre », il faut bien avoué que je n’avais pas pour autant accordé ma confiance et que j’étais resté sur le seuil de ma porte. A l’image de ses prestations scéniques, Gotan Project semblait perdu entre passé et futur.

Le très cinématographique « Tango Square », BO idéal pour les égarements amoureux d’un vieux jazzman fatigué qui écumerait les bars à la recherche de la dernière ivresse sacrée, ouvre avec brio l’album. Gotan Project revient avant tout avec des « chansons » et ceux quelque soit leur positionnement. « Desilusion » offre dans sa seconde partie une brillante décélération / accélération. Riche en invitations au voyage, Gotan Project se doit de trouver le juste milieu entre hommage au Tango classique et capacité à l’emmener vers des terres plus intrigantes. Parfois il réussit en réintégrant sans lourdeur ses fameuses boucles électroniques (« La Gloria »), parfois il échoue trop respectueux de sa propre culture pour oser faire plus qu’une relecture rythmiquement améliorée (« Peligro »). C’est ainsi sur les titres où il prend le plus de risque, où il se fait le plus deep que le collectif convainc le plus aisément : « Mil Millones » prend son temps et livre un tango dépressif post-moderne des plus intrigants, et « Tu Misterio » enivre par de brillantes interventions d’une trompette qui fait le pont entre l’accordéon et les boucles.

Le problème c’est que comme souvent le groupe avance à la passion sans spécialement se préoccuper de la notion d’album. Les envies se retrouvent instinctivement sur le disque sans autre mise en perspective. Les chœurs enfantins sur « Rayuela » nuisent à la sobriété des mélodies, tandis que les trop nombreux samples de voix cassent inutilement le charme de « De Hombre De Hombre ».

Mais malgré tout, on finit très rapidement par se sentir bien dans ce « Tango 3.0 » qui s’adapte à de nombreux instants, donnant l’occasion de s’imaginer dans milles aventures argentinesques. Certes on ne se laisse que peu surprendre (« El Mensajero ») et les limites sont souvent atteintes par une approche parfois trop artisannale, mais l’amour placé dans les rythmiques d’un « Panamericana » devrait aisément irriguer votre corps de ces saveurs qui vous dépaysent sans jamais vous perdre.

Note : 7/10

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