Harpiste anglaise qui a déjà travaillé aux côtés de Tunng et Capitol K (qui co-produit d’ailleurs ce « Change is Good, Change is Good »), Serafina Steer revient avec une douceur pop-folk aux contours raffinés et aux mélodies lumineuses.
De la même manière que certains utilisent la guitare pour donner de l’ampleur et de la musicalité à une voix habitée d’un trop plein d’émotion, Serafina Steer a bien conscience que sa harpe doit toujours être au service des chansons et jamais l’inverse. L’opus évite ainsi toute incartade démonstrative et reste toujours caritatif, prêt à épauler les âmes esseulées.
Sur les compositions épurées, le batteur Seb Rochford vient déposer en toute discrétion une rythmique rock qui permet ainsi aux titres de jouer sur les deux tableaux (« GSOH »). « Day Clo » est une pépite de post-folk à tendance suédoise proche de Soap & Skin où tout est à la fois froid et organique.
Du chant d’église (« Shut Up Shop ») à la complainte « The Valley », la harpe devient presque une métaphore de la musique : ce qui aurait pu passer au premier abord pour encombrant ne cesse d’affirmer sa profondeur et sa subtilité tout en s’imposant dans l’espace. On s’y sent protégé, détenteur d’un immense secret. Il y a ici suffisamment de souvenirs pour vous rappeler le confort du foyer (« How To Haunt A House Party » et ses entêtantes boucles électroniques), suffisamment de repères pour vous éviter le home-sickness (« Motion Pictures »), et pourtant inutile de le nier vous êtes bien à milles lieux de chez vous. Aussi incongru qu’il puisse paraître à la première écoute « Margoton », où Serafina Steer s’essaye au français, provoque un rapport attraction/répulsion qui oblige sans cesse à y revenir. A mille lieux, mais sans pour autant oublier sa culture.
Les chansons sont courtes (« The Sister Of Proportion »), ce sont de furtifs rayons de soleil puissants et condensés qui réchauffent la neige et la rende amicale. Définitivement, au-delà d’être harpiste, Serafina Steer est avant tout une grande songwriter toujours sur le fil. « Port Isaac » n’a nullement besoin d’artifice pour briller. Il y a ici une touchante juxtaposition entre épurations et folies mélodiques. « Change is Good, Change is Good » est d’une émouvante brièveté, un éclat sacré sur lequel vient se refléter les joies et les malheurs du monde.
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