65daysofstatic : Accomplissement
A propos de l'album Wild Light
J’ai découvert 65daysofstatic en 2004 avec la sortie de leur premier album The fall of math. Je ne sais plus exactement comment ça s’est passé, si c’était suite à la lecture d’une chronique, après avoir récupéré un flyer à un concert ou, pire, parce que j’avais fait confiance à ce qui était écrit sur un sticker. Toujours est-il que j’ai acheté The fall of math persuadé que 65daysofstatic était un mélange entre Radiohead, Aphex Twin et Tool (ou Mogwai je ne sais plus). Oui, il y avait à l’époque un journaliste/publicitaire assez doué pour m’avoir mis cette idée dans la tête. Je me souviens que la proposition me séduisit énormément : je pensais alors que les esthétiques pouvaient être prélevées et additionnées pour créer des chansons encore plus stimulantes ; j’étais jeune et je m’amusais encore à composer mon groupe parfait, à débattre des heures avec des potes pour savoir quel guitariste on choisirait et quelles seraient les meilleures associations. Bien évidemment 65daysofstatic s’avéra être un groupe qui ne ressemblait absolument pas aux précités – à part un gimmick piqué ici ou là chez Richard D. James –, mais qui intriguait sincèrement par sa volonté de faire dialoguer post-rock et electro, non pas par simple goût du mélange, mais vraiment parce que le groupe possédait la conviction de l’existence d’un langage commun dont la pertinence pourrait s’exprimer à la fois dans les passages calmes et violents. En gros, même si elle ne paraissait pas très fine sur le papier, le groupe posait la question suivante : si des bleeps electro accompagnent idéalement une guitare claire, est-ce qu’une déferlante drum and bass est le complémentaire parfait d’une série de riffs rageux ?
Depuis 65daysofstatic n’a jamais perdu de vue son objectif initial, passant les années et les quatre albums suivant à tâtonner, à affiner sa formule et à modifier les dosages, tentant un jour d’accentuer un peu les guitares, pour le lendemain favoriser les déhanchements électroniques et les boucles (Go Complex, Tiger Me…), ou au contraire se focaliser sur les ambiances (Lyonnesse, Don’t go down to sorrow…), n’hésitant pas parfois à mettre le piano en avant. Le groupe alla même jusqu’à tenter de rajouter une variable dans l’équation avec la voix de Robert Smith sur Come to me. Mais peu importe la forme, la mission est restée la même. Cela explique parfaitement la défiance et/ou la déception qu’ont pu générer les derniers albums du groupe. On les pensait bien partis, et les voilà qui tiraient trop violement dans un sens, qui modifiaient grossièrement les pourcentages. On voyait bien qu’ils essayaient des trucs, mais le résultat manquait de finesse et de sens, au point que je me sois déjà dit que 65daysofstatic n’était finalement peut-être qu’un groupe de fusion de plus ; un de ces groupes qui s’intéressent plus à l’idée même du mélange qu’à la pertinence du résultat.
Wild Light, sixième album du groupe, vient aujourd’hui éclairer la discographie d’une bien belle manière, car l’on a maintenant la certitude que l’objectif initial est toujours resté au cœur des préoccupations. Après presque une décennie de travail, 65daysofstatic arrive enfin à ce qu’il cherchait depuis le début, et Wild Light est probablement leur meilleur disque. Toutes les erreurs du passé ont été écartées, le son a été dégrossi, les mélodies, affinées, et le fameux équilibre tant recherché apparait enfin devant nous. Et c’est magnifique. Oui c’est magnifique de voir un groupe réussir enfin à exprimer ce qu’il avait en lui depuis si longtemps. Cela démontre combien il n’a jamais cessé de s’auto challenger et de creuser encore et encore sa voie.
Aujourd’hui on est à la fois dans la confiance et le plaisir, et ça se ressent à chaque instant sur Wild Light. Lorsqu’on écoute des titres comme Blackspots, on ne peut qu’y voir un aboutissement : tous les éléments sont en place, rien n’est laissé en arrière. Il y a peut-être un côté shoegaze (presque M83) qui ressort par moment, au point qu’on y voit une forme de liant, ou de catalyseur qui permet enfin à la formule de révéler pleinement ses possibilités. Le groupe prend son temps (Taipei). Il a appris à ralentir la cadence lorsque c’est nécessaire et à laisser les nappes combler les espaces. Il joue également toujours des montées en puissances avec une certaine classe (Unmake the wild light).
Tout parait plus fluide et mieux amené (les breaks sur Prisms). En cherchant l’équilibre entre rock et electro, 65daysofstatic est surtout arrivé à trouver un juste milieu entre énergie, expérimentations et mélodies ; et dans un sens on se dit que c’est peut-être ce que ses membres avaient toujours cherché.