1) David Bowie – “Heroes” (Isabelle Chelley)Extrait de “Heroes” – 1977 – Rock
Jusqu’à juillet 2014, “Heroes” n’avait jamais fait partie de mes chansons préférées de Bowie, trop vite classée dans la catégorie semi-honnie des hymnes rock. Il m’aura fallu un séjour à Berlin, une visite à l’exposition sur David B., des kilomètres parcourus dans une ville qui ne cesse de se reconfigurer sans oublier son passé, un passage par les studios Hansa – jadis situés au pied du mur, là où s’embrassent les héros de la chanson (le producteur Tony Visconti et une choriste dit la légende) – pour la réévaluer. Pour adorer le mélange organique/électronique de son orchestration, le travail vocal de Bowie, sobre, presque glacial au début, puis à fleur de nerfs plus “Heroes” progresse. En prime, l’album qui porte son titre n’est pas sale non plus.
2) HS87 ft. Hit-Boy & Young Dro – “On everything” (Alexandre Mathis)
Extrait de “We the plug” – 2014 – Hip-hop
L’été, c’est l’époque où l’on se prend pour un caïd en roulant les fenêtres de la bagnole ouvertes et en mettant le son qui apportera le plus de street credibility possible. Pour remplir au mieux cette tâche, HS87 fait dans le grandiloquent. Avec “On everything”, le beat est entêtant, les ruptures de rythmes s’avèrent délicieuses, bref tout marche à la perfection. Cerise sur le gâteau, la douceur fondante du refrain font de cette chanson un petit chef-d’oeuvre. Finalement, on l’écoutera aussi en hiver. Fenêtres fermées par contre.
3) Jungle – “Busy Earnin’” (Catnatt)
Extrait de “Busy Earnin’” – 2014 – Trip Hop Soul de la muerte
NOTRE morceau avec ma fille. On l’écoute en boucle et, moi je rêve d’apprendre la chorégraphie du clip par coeur. Gros coup de foudre, j’attends avec impatience leur album. Pourvu qu’ils ne me fassent pas comme Solomon Grey, mon coup de foudre de l’année 2013 qui s’est perdu en cours d’EP…
4) Total control – “Flesh war” (Benjamin Fogel)
Extrait de “Typical System” – 2014 – Synth-punk
Débuté comme un groupe new wave / synth pop par deux anciens membres du groupe australien Eddy Current Suppression Ring , Total Control a très vite grossi pour devenir, suite au recrutement d’un guitariste, d’un bassiste et d’un batteur, un véritable groupe de rock qui regarde encore un peu plus loin dans le rétroviseur pour retrouver la hargne du post-punk. En gros, le groupe a glissé de Gary Numan et Depeche Mode vers Devo et Wire sans renier ses amours originels. Depuis il crâne à raison avec son synth-punk à la fois abrasif et accessible, ouvert et curieux, qui démontre un joli talent d’écriture. “Typical System”, leur second album, contient un lot de singles impressionnants – dont ce “Flesh war” – qui lui permettent de se hisser au-dessus de la mêlée, et de passer dans le camps des descendants plutôt que dans celui des copieurs suceurs nostalgiques.
5) Pulp – “Common people” (Thomas Messias)
Extrait de “Common people” – 1995 – Britpop
Mes pas m’ont ramené dans cette ville où jadis je festoyais jusqu’à pas d’heure au gré de playlists éclectiques mais toujours distinguées, stigmates d’une hipster attitude dont j’ignorais encore le nom. Le clou de la soirée était toujours le même : ces deux amis interprétant en playback, et avec chorégraphie de leur cru, le morceau du groupe de Jarvis Cocker. Un condensé de rage et d’euphorie, symbole de ce moment où le dandy semble prêt à faire péter les boutons de sa chemise pour mieux se mettre à pogoter. Mes pas m’ont ramené dans cette ville où j’espère assister, tant d’années après, à d’autres “Common people” endiablés.
6) Army of lovers – “Crucified” (Thierry Chatain)
Extrait de “Massive Luxury Overdose” – 1991 – Hymne camp
Généralement, on pense que je plaisante quand j’affirme adorer ce titre. Ou que c’est juste au nième degré. Sauf que non. Cette pièce montée eurodance à la chantilly, comme une dernière éjaculation eighties au début de la décennie suivante, me réjouit vraiment, de l’énorme refrain en mineur aux paroles outrageusement camp paresseusement rappées des refrains. À déguster de préférence accompagnée de son clip too much, d’un parfait mauvais goût assumé.
7) Jakki – “Sun sun sun” (Laura Fredducci)
Extrait de “Sun… Sun… Sun” – 1976 – Disco
Huit minutes de pur bonheur ensoleillé pour ce remix de Walter Gibbons qui donne irrésistiblement envie de se lever de son transat, son bureau ou sa serviette de plage pour se déhancher avec un sourire béat.
8) Vincent Delerm & Valérie Lemercier – “Le coup de soleil” (Lucile Bellan)
Extrait de “Favourite songs” – 2007 – Chanson
Ça revient avec les vacances, comme une envie de plage de sable chaud, de glaces à l’eau, de cocktails qui font tourner la tête à la tombée du jour. J’ai attrapé un coup d’soleil, un coup d’amour, un coup de je t’aime. Je suis amoureuse, le soleil m’offre ses rayons, je sens la brise légère sur mes jambes nues et dans ma tête résonne la chanson de Richard Cocciante. Mais avec la voix et le piano de Vincent Delerm, celle de Valérie Lemercier comme un point d’exclamation.
9) Byard Lancaster – “Satan” (Dom Tr)
Extrait de “It’s not up to us” – 1968 – Jazz mystique
En neuf minutes d’une angoisse palpable, Byard Lancaster lâchait en 1968 un véritable brûlot free qui venait alors clore avec brio “It’s Not Up To Us”, sa première session en tant que leader. Porté par la technicité hors norme d’un Sonny Sharrock alors à ses débuts, ‘Satan’ illustre de la meilleure des façons la richesse d’une approche totalement décomplexée sans jamais succomber aux sirènes du grand n’importe quoi. Une énergie noire concentrée à l’extrême, dont le feu intérieur ne continuait à s’alimenter qu’à la faveur de la frénésie des congas, de la batterie et du frottement des cordes, dans une habile mélange de chaos et d’ordre aussi profond qu’instable.
10) Caribou – “Can’t do without you” (Alexis Joan-Grangé)
Extrait de “Our love” – 2014 – House d’été
11) Cameo – “Candy” (Christophe Gauthier)
Extrait de “Word Up !” – 1986 – Electrofunk
Quelle saleté, les bonbons : une fois qu’on en a mangé un, on ne peut pas s’empêcher d’en reprendre. Candy, c’est pareil. Ça colle non pas aux dents mais aux oreilles et ça donne envie d’y retourner. Il y a pourtant quelques repoussoirs chez Cameo à l’époque de ce morceau : un son devenu très électronique (alors qu’initialement le groupe produisait un funk Parliamentesque de belle facture) et un look improbable à base de vestes à épaulettes, cuissardes et coques protège-burnes rouge vif. Mais bizarrement, ça marche. Cameo, c’est mon petit plaisir coupable de l’été.
12) Nil Hartman – “30” (Dat’)
2014 – Electronica
6 ans d’absence, c’est bien trop. Un seul Ep à son actif, plus quelques bien rares morceaux à glaner sur le net, c’est frustrant. Et voila que Nil re-déboule de nul part, annonçant comme tous les ans l’éventuelle sortie de son premier album avec un premier single. “30”, c’est une litanie folle, qui donne envie de chialer, de prier, de danser, de se bourrer la gueule, de mourir. Quelque chose qui se chante sous la douche, qui se hurle défoncé en pleine nuit. Nil, en 2014, c’est tout simple, mais c’est putain de beau. Tout est une histoire de mélodie.
À écouter sur Bandcamp.
13) Aldous Hardin – “Stop your tears” (Arbobo)
Extrait de Aldous Harding – 2014 – Folk
C’est l’été, des peaux dorent sur le sable, ailleurs des esprits s’échauffent, c’est l’été et le soleil est le plus fort. Du bas de la carte, de la fraicheur des lacs de Nouvelle Zélande un chant remonte à contre-courant. C’est sa sécheresse et sa maturité qui frappent.
Ecouter la jeune Aldous Harding, c’est ralentir. Elle a semé là où affleurent les racines de Vashti Bunyan ou Laura Gibson. C’est l’été, la sagesse est de se poser, la lenteur est d’or.