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La fantaisie n’est ni militaire ni héroïque, elle se situe dans un no mans land illusoire où les geeks sont lettrés et où les poètes s’adonnent aux divertissements vidéo ludiques. Si j’avais tenu un blog dans les années 90, je l’aurais probablement appelé Metal Gear. Et moi aussi, il m’aurait fallu attendre d’avoir des lecteurs au Japon pour changer de nom. Enfin, dorénavant si Final Fantasy s’appellera Owen Pallett, le terrain de jeu lui ne changera pas du tout, il s’adaptera juste aux révolutions.

Dans le lignée directe des deux précédents Ep (« Spectrum, 14th Century » et « Plays to Please ») « Midnight Directives » permet de se refamiliariser avec cet univers qui tout en conservant l’exigence du songwriting de l’indie-folk exploite des chemins bien plus ardus. Immédiatement on se sent bien dans cette pop opaque mais intense (« Keep the Dog Quiet ») qui ne manque pas d’accointance avec par exemple un Antony & The Johnsons (« Lewis Takes Off His Shirt »).

Sur « The Great Elsewhere », les sonorités se font angoissantes avant de laisser la rythmique s’envoler et voir l’intensité émotionnelle s’accroître à foison. Il y a vraiment chez Owen Pallett une touchante volonté de réécrire l’histoire de la musique classique en s’éloignant aussi bien des contemporains comme Bartok que des musiques poussives de films (« Red Sun No. 5 »). Le violoniste canadien module à foison l’utilisation de son violon. Pincées ou à l’archet, les notes se suffisent à elles-même, et dirigent les chansons.

A tord ou à raison, Final Fantasy a toujours fait dans les extrêmes, et l’épilogue « Mount Alpentine » qui conclue « Keep the Dog Quiet » illustre bien le genre d’excès dramatique dans lesquels peut tomber Owen Pallett. Si le garçon avait été en mesure de jouer les barytons, nul doute que « Heartland » se serait plus souvent drapé des codes de l’opéra. Cependant même lorsqu’il pousse l’auditeur dans ses retranchements, l’orchestration semble si implicite, si naturelle, que jamais n’est remise en cause la sincérité de la démarche (« Lewis Takes Action »). On met le doigt ici sur ce qui fait la vraie spécificité : cette capacité à toucher avec des chansons qui auraient tout juste été bonnes à écœurer chez d’autres. Du coup même les titres les plus enjoués en mode « Fantasia » de Disney (« Flare Gun ») s’incluent avec aisance dans le panel d’émotions proposé par « Heartland ».

« What Do You Think Will Happen Now? » J’espère juste que pour une fois on profitera de l’instant présent, qu’on se laissera toucher, qu’on acceptera la musique avec ses forces et ses faiblesses, et qu’on passera outre l’exercice abscons dans le cas présent des pistes d’améliorations. Si ce parcours initiatique est temporellement moins long que chez son homologue dans du monde des jeux vidéo, il n’en est pas moins passionnant et ce avec une durée de vie tout aussi remarquable.

Note : 8,5/10