Girl : tout, tout de suite
Présenté samedi 12 mai à Un Certain regard. Durée : 1h45. Sortie : 10 octobre 2018.
Que faut-il pour être une femme ? Des seins, une vulve, ses règles, des mouvements gracieux ? Ou alors rien de tout ça ? Lara est une femme. Née dans le corps de Victor, Lara a décidé, à 16 ans, de devenir enfin la jeune femme et la danseuse qu’elle se sent être. En pleine transition, entourée par sa famille, des médecins et l’équipe pédagogique de son école de danse, Lara souffre pourtant de ne pas correspondre déjà à l’image de la femme qu’elle aimerait devenir.
Chaque jour est une suite de luttes. La remise à niveau en danse classique est l’une d’entre elles : les danseuses, contrairement aux danseurs, apprennent à faire des pointes à 12 ans. Lara a quelques semaines pour acquérir le niveau que d’autres ont mis des années à atteindre. L’autre combat est celui de son corps dont elle observe les changements. Lara se fait violence, active dans son évolution. Elle ne réalise pas que, déjà jeune femme, elle partage les mêmes frustrations du corps auquel il faut s’habituer, la même peur de l’autre, de toucher et de se laisser toucher.
L’année dernière, en séance spéciale, le festival présentait le premier film de la réalisatrice Anahita Ghazvinizadeh, They. Celui-ci retraçait l’histoire de J, se faisant appeler They tant qu’iel n’avait pas décidé son genre. Cette fois avec Girl, la question de la transidentité trouve sa place sur la Croisette avec un portrait au moins aussi fort, beau et touchant qui questionne également nos propres préjugés sur les rôles assignés.
Cette guerrière de Lara ne voit pas avec quel courage elle mène son combat pour renaître. Mais elle est jeune et veut tout, tout de suite. Girl est une histoire de chemin, de patience, du temps qui a parfois besoin de passer et la bienveillance avec laquelle nous devrions nous voir. Lukas Dhont filme avec une grande délicatesse son personnage lumineux et passionné. Et il laisse au spectateur le soin de mesurer la violence, sans avoir besoin de plus l’appuyer. Girl rappelle combien, chacune à sa manière et souvent dans la souffrance, on ne nait jamais femme, on le devient.
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