Le 22 juin 2009 / Paris, Place Saint Sulpice. La première édition de la nuit de la photographie contemporaine m’avait passablement déçu de par le manque d’artistes pertinents, et seule la sélection de Charlet Photographie avait une fois de plus réussie à m’émouvoir. Néanmoins, c’est avec un plaisir non feint que j’accueillis le renouvellement de cette excellente initiative.
Disons le de suite, un vrai gap de qualité a été franchi entre la première et cette seconde édition. Choix plus pointilleux, événement plus attractif ? Je ne sais pas quelles en sont les causes mais la montée en gamme était clairement implicite. L’idéal serait évidemment de chroniquer l’événement artiste par artiste mais l’exercice s’avérerait probablement aussi périlleux et chronophage que de décortiquer le dernier Enki Bilal vignette par vignette. J’opterais donc pour une démarche plus proche de l’état de flânerie perpétuelle avec lequel j’ai abordé l’exposition : impressions, suppositions et ressentiments à la volée.
Via des noir & blanc où les arbres sont emplis de mystères et dévoilent des formes quasi animales, Laurence Toussaint propose des œuvres ethniques où la nature n’est pas sacrifiée sur l’autel de la banalité. Bénédicte Loyen photographie la vieillesse et la misère humaine avec justesse, même si la thématique reste un peu facile. Les « Errances » de Corinne Heraud attire via un rendu craquelé comme si les photos étaient recouvertes d’écumes. Avec Sabrina Biancuzzi, on se croit perdu dans la forêt d’Antichrist. On s’amuse devant les sacs vidés d’Aurélie Prissette, du sous Sophie Calle qui reste plaisant. On s’attarde sur les belles mises en situation de Vincent Goutal avec sa série « Visions de l’Est », et on s’arrête net devant la grosse sélection de portraits stylisés de David Law où collages, contrastes et effets transcendent les visages.
Cette courte liste prouve déjà combien l’événement m’a qualitativement et quantitativement bien plus impressionné que l’année dernière. Après je ne peux non plus nier qu’il comportait son lot d’infamie propre à la photographie contemporaine. Il y a bien trois types de photographie que je ne supporte plus, trois styles tellement galvaudés, vus et revus, qui au mieux me laissent insensible, au pire m’écœurent : les noirs et blancs faussement artistiques, les flous trop évidents et surtout les nus vulgaires dénués de toute sensibilité. Et malheureusement, on ne peut pas dire que ces trois styles n’étaient pas plus que représentés en ce lundi 22 juin ; confère Marc Wolf ou Damien Guillaume par exemple. Je reste aussi complètement distant face aux nus de Sue Rynski et à sa série « Music, Light & Shadow : Listening to the White Stripes. » ; il ne suffit pas d’avoir photographier Iggy Pop en live pour posséder la touche « Rock’n’Roll ».
On s’ennuie aussi un peu devant pas mal d’artistes dont le manque de personnalité n’aide pas les sens à se mettre en éveil. Je pense en vrac à Augustin Détienne, Alexandre Resovaglio, Thomas Lang… et surtout au animaux gonflables de Sophie Mabille.
Sinon, gros coup de cœur pour les constructions de Julien Barbanel, qui présente des montages visionnaires où la ville prend mille couleurs tout en conservant une chaleur attractive, des photos assez proches de certains travaux vus en fin d’année dernière à la Biennale de Venise. A noter également, que malgré mes réticences exprimées plus haut, les nus d’Elea Rage m’ont touché grâce à des touches intrigantes mélangeant noirceur et naïveté enfantine.
Finalement à la fin de cette deuxième édition de « La nuit de la photographie contemporaine », on en arrive au même constat que l’année précédente : c’est la sélection de Charlet Photographie qui était la plus pertinente, que ce soit avec Grégoire Philipidhis, Hervé Lequeux, ou les classiques mais toujours somptueuses Estelle Lagarde et Liliroze. La seule différence, c’est que cette année, Dominique Charlet avait un peu de concurrence, et que ça, ça change tout ;)
Note : 8/10
Dans l’ordre Laurence Toussaint, Corinne Heraud, Sabrina Biancuzzi, Marc Wolf, Aurélie Prissette et David Law.