Isis, troisième membre de la sainte-trinité post-hardcore (avec Cult of Luna et Neurosis), sort le successeur à « In the absence of truth », dans une optique assez similaire de celle de Cult Of Luna. Tout comme les suédois qui avaient joué la carte de la continuité, tant « Eternal Kingdom » était dans le prolongement total et absolu de « Somewhere Along The Highway », Isis se retrouve également un peu coincé dans le style dont ils sont un des membres fondateurs. Voulant proposer plus mais sans perdre ses acquis, on sent qu’Isis voudrait à la fois être plus post-harcore et plus métal, comme s’ils hésitaient entre revenir à leurs premiers amours et poursuivre l’évolution entamée sur « In the absence of truth », évolution censée les rapprocher de Tool ; Adam Jones le guitariste de Tool étant d’ailleurs présent sur deux titres
D’entrée de jeu, « Wavering Radiant » laisse perplexe. Il est à la fois plus et moins direct. Plus direct car plus facile à assimiler avec des titres qui ne s’enquiquine pas de longues introduction ou de développement progressifs difficiles à retenir. Moins direct car proposant un son moins imposant. On sent la production moins abrupte, les guitares sont moins violentes, moins compressées, et le ratio cris sur lignes de chant clair commence de plus en plus à atteindre l’équilibre. Le rendu de la batterie a lui aussi évolué : plus léché, moins frontal. Autant de détails qui peuvent rapidement divisés les fans. Car en fait à l’écoute de « Wavering Radiant » on ne sait pas si Isis fait du sur-place ou s’il est en pleine mutation. Pour ma part je trouve que le rapprochement avec Tool est de plus en plus incontestable, que ce soit au niveau de la section rythmique (la basse sur « Ghost Key », la batterie sur « Threshold of Transformation ») que dans la volonté de sortir des riffs à la fois métal et ambiant.
On sent qu’Isis souhaiterait sortir du carcan de la scène post-hardcore, mais qu’il n’est pas encore prêt. On sent Aaron Turner hésitant, préférant ne pas trop se mouiller, ni dans la violence, ni dans les passages chantés. Mais que les choses soient claires, « Wavering Radiant » ne manque pas de grands morceaux, bien au contraire, il révèle une accessibilité bienvenue pour un groupe aussi opaque. Malgré leur longueur des titres comme « Hand of the Host » et « Stone to wake a serpent » ne sont jamais ennuyeux ; il y a toujours ce soupçon de violence, d’émotion et d’expérimentations qui transforment les morceaux en un curieux mélange entre Pink Floyd et Converge, car ici le plus beau développement progressif peut toujours finir dans les cris et la rage. De la même manière « 20 Minutes/40 Years » propose une évolution mélodique passionnante et l’on reste l’oreille scotchée à cette guitare qui nous emmène vers des terres inattendues, proche de Pelican.
Si certains verront une trahison dans cette démarche d’ouverture vers une musique moins ardue, j’y vois une opportunité. Tool règne depuis plus d’une décennie en maître absolu sur le style qu’il a créée et imaginer Isis venir épauler Tool dans cette tâche complexe de donner ces lettres de noblesse à un style souvent décrié, me rassure. Certes Isis n’a pas encore ce sens de la structure et des rythmiques évolutives pour s’imposer à un si haut niveau, mais leurs racines post-hardore mélangée à des ambiances plus nuancées font de « Wavering Radiant » un pont vers un avenir que j’imagine passionnant. Pas le chef d’œuvre attendu mais une étape de plus.
Note : 7,5/10