Ils sont nés dans la brume. Ils ont grandit dans la fumée de Londres, dans le “smog”, ce mélange de pollution et de brume. Ils ont appris à vivre dans le gris profond et inaltérable de Londres, la ville où les taxis sont noirs. C’est tout un camaïeu de noir et de blanc qui a fait d’eux ce qu’ils sont aujourd’hui, et qui a fait leur musique. Seefeel, c’est la ville, mais pas exactement celle de Burial. Surtout, Seefeel s’échappe de Londres et de sa grisaille. Seefeel, en un album, conte une escapade à la campagne.
D’abord, le rythme de la ville, et la dure répétition des bruits, des sons. Toujours les mêmes, qui frappent quoiqu’il arrive les oreilles. Un rythme inamovible, épileptique, sur lequel se greffe des vagues de violence analogique. Mais Seefeel brouille peu à peu son jeu, et les marches martiales se délitent. On s’éloigne de l’horreur de la ville. Les tags sur les murs laissent place à des murs comme grandes étendues planes et insurmontables. Les rangées d’immeubles s’effacent, des espaces s’ouvrent. A travers les vitres, on voit de mieux en mieux la pluie.
Le brouhaha de la ville s’étouffe alors, et on commence à entendre des voix humaines. Elles sont comme des incantations, elles se répètent. Les échos des voix atténuent la violence de la musique, et le noir et blanc de la ville devient peu à peu coloré. Les sons deviennent peu à peu lisibles. On saisit dans cet amas des mélodies. Seefeel file à tout allure hors du tohu-bohu, sans pour autant perdre en densité. Juste que les paysages décrits changent, alors que la brume demeure. De la grisaille à la lumière, des forêts d’immeubles à des rangées d’arbres, des sons des métros aux voix envoûtantes des sirènes. Pas celle des voitures mais celles, magiques, qui hantent les profondeurs des étangs. Mais toute escapade a une fin, et l’on se retrouve bien vite plongé dans l’atmosphère lourd et violent d’une ville, à nouveau. Le gris reprend le dessus, les voix s’estompent peu à peu au profit des fracas.
Seize ans après le chef d’oeuvre Succour, Seefeel s’échappe de l’étouffement urbain avec son nouvel album, sorti chez Warp. Une fuite en technicolor.
Note : 7,5/10
>> Un toit, un avenir : aidons Haïti à se reconstruire : Playlist Society soutient Planète Urgence dans le cadre de l’opération humanitaire “Un toit, un avenir” qui s’adresse aux populations sinistrées par le séisme de janvier 2010. Ce projet porte sur la réhabilitation des habitats et un appui aux activités économiques. Laurence Guenoun, photographe, est parti là-bas pour faire des reportages et des photos. Elle en est revenue avec une idée précise : agir à son niveau et partager ses connaissances avec des enfants. Elle aimerait donc leur fournir des cours de photographie et monter des ateliers d’apprentissage sur place. Afin de trouver les fonds nécessaires pour cette opération, elle organise avec Planète Urgence une vente de photos : https://www.planete-urgence.org/nous/vente-photos-haiti.php