Wovenhand a été purgé des vices de « Ten Stones » et on ne retrouvera sur « The Threshing Floor » ni les guitares rugueuses de « The Beautiful Axe », ni le punk-folk de « Kicking Bird », ni les refrains fédérateurs de « Not One Stone », ni même l’émotion des post-ballades comme « Quiet Nights & Quiet Stars ». Non, il s’agit d’un album plus intimiste comme « Mosaic », d’un album où David Eugene Edwards continue de se chercher et poursuit l’exploration de lui-même entamée avec « Blush Music ». Le songwriting y est ainsi implicitement moins ambitieux mais toujours aussi personnel.
Dès les chants mystiques de « Sinking Hands », on sait que « The Threshing Floor » sera un album plus opaque, plus mystérieux, un véritable labyrinthe dans la pensée déjà torturée de son créateur ; une impression rapidement confirmée par « Raise Her Hands ». Quelque soit le procédé créatif, David Eugene Edwards aime à se retrouver isolé, évitant souvent les grosses tournées et la promiscuité d’un groupe. Wovenhand est une extension de son univers, de sa vie, un parcours à mille chemins qui se croisent et s’entrechoquent, mais un parcours que l’on doit suivre seul.
C’est lorsque la rythmique joue le décalage avec l’univers folk et qu’un mur de son porte la force des incantations que Wovenhand se fait le plus envoûtant (« Thruth », reprise de New Order). Plus le temps passe, plus David Eugene Edwards marche dans les pas de David Tibet, et les abîmes de Wovenhand pourraient bientôt côtoyer ceux de Current 93 (« Behind Your Breath »).
« The Threshing Floor » se clôture sur un « Denver City », blues-rock à souhait et étonnamment empli d’espoir, qui ne peut se défendre d’être une évidente référence au Denver Sound dont David Eugene Edwards fut en quelque sorte l’effigie. Faut-il y voir la sortie du labyrinthe ? Non plutôt un oasis de verdure caché au milieu de celui-ci. Nul doute que le voyage initiatique n’est pas fini et que les shamans ont encore fort à faire avec Wovenhand.